Chers frères et sœurs,

N’est-ce pas là l’essentiel de notre vie d’homme ? Travailler notre cœur afin de le rendre apte à accueillir le Parole de Dieu, de la faire germer et croître tout au long de notre vie. Tout homme porte en lui la capacité à devenir saint, ainsi Dieu sème avec générosité, sans distinction. Le travail de la terre demande une attention et un labeur continue, il en va de même avec notre cœur. Avec volonté. Avec vigilance. Voici quelques modestes réflexions à ce sujet.

Il faut en premier lieu porter attention à protéger notre cœur, à le ménager. Comme un agriculteur cultive avec préférence et plus d’aisance un champ situé quelque peu à l’abri du vent et intempéries, faisons de même pour notre vie. Ne nous exposons pas inutilement à toutes sortes de stimuli et tentations qui nous tiennent éloigner d’une vie intérieure. Nous avons assez de combat à mener que pour en rajouter. Ainsi nous vivons aujourd’hui dans un déluge permanent de contenu. Images, information de tout genre et de qualités diverses, opinions, jeux, et j’en passe. Via une multitude de média et applications. Osons-nous nous couper de ce flot intarissable. Tout est permis, nous dit l’Apôtre, mais tout ne nous est pas utile. Nous n’invitons pas n’importe qui chez nous, faisons-la même chose avec tout ce brouhaha qui nous entourent. Pensons à l’image d’un jardin de cloître, ouvert vers le haut, vers le soleil, mais entouré d’un déambulatoire et mur vers la terre environnante pour filtrer l’accès.

Ensuite, un bon agriculteur arrache les mauvaises herbes quand elles apparaissent. Il n’attend pas que son champ en soit envahi. Dorothée de Gaza nous fait le récit suivant, et je cite : « Un grand vieillard se délassait avec ses disciples en un lieu où se trouvaient des cyprès de tailles variées, des petits et des grands. Il dit à l’un de ses disciples : « Arrache ce cyprès. » L’arbre était tout petit, et aussitôt, d’une seule main, le frère l’arracha. Le vieillard lui montra ensuite un autre cyprès, plus grand que le premier, en lui disant : « Arrache aussi celui-là. » Le frère l’arracha en le secouant des deux mains. Alors le vieillard lui en désigna un autre plus grand, que le frère eut plus de peine à arracher. Il lui en indiqua encore un plus grand : le frère secoua beaucoup en ne l’enleva qu’à force de peine et de sueurs. Enfin, le vieillard lui désigna un autre arbre encore plus grand, et cette fois le frère, après beaucoup de travail et de sueur, ne put l’arracher. Le vieillard, voyant son impuissance, ordonna frère de se lever et de l’aider. A deux ils purent l’arracher. « Ainsi en est-il des passions, frères, leur dit alors le vieillard. Tant qu’elles sont petites, nous pouvons les retrancher facilement, si nous le voulons. Mais si nous les négligeons parce qu’elles sont petites, elles se durcissent, et plus elles se durcissent, plus elles exigent de peine. Si elles ont jeté de profondes racines en nous, nous ne parviendrons plus, même avec effort, à nous en défaire, à moins de recevoir du secours de saints qui, après Dieu, s’occupent de nous. » »[1]. Ce récit nous montre beaucoup de choses concernant l’entretien de notre jardin spirituel. Il nous parle de l’obéissance, du repentir, de la confession et de la prière. Ne tardons pas à nous confesser et nous réconcilier, il est un grand mal de postposer cet exercice difficile mais essentiel à notre âme. Ne nous laissons pas effrayer ou retenir pas l’imperfection de notre repentir et confession, par l’imperfection de notre prière ! Le Christ n’est-il pas venu pour sauver les pécheurs ? Le mot d’ordre est la constance, le combat lent et pas à pas. Il n’est pas nécessaire de faire des grands combats tous les jours. Il est plus important de l’entretenir avec régularité.

Pour finir cette courte réflexion, c’est au soleil que les fruits murissent et prennent toutes leurs saveurs. Exposons-nous au soleil de justice. Soyons assidus à la Divine Liturgie et à l’écoute et la lecture de la Parole de Dieu. Ne nous privons pas de la communion aux Saints Dons. Il faut s’y préparer, certainement, mais ne devons-nous pas être prêt chaque jour ? Rappelons-nous la Parabole des dix vierges. Veillons-donc puisque nous ne savons ni le jour ni l’heure.

Amen


[1] Dorothée de Gaza, Guide spirituel, Editions de Solesmes, 1996