Donnée par le père Michael le dimanche 25 juin 2023.

Commençons par quelques mots sur l’auteur de ce livre : le père Alexandre Schmemann, 1921-1983, est un des trois théologiens académiques de niveau que nous a donné l’Académie de théologie Saint Serge à Paris, fondée en 1925 pour former des prêtres orthodoxes pour les communautés de russes exilés après la Révolution de 1917. Les deux autres sont le père John Meyendorff et le père Boris Bobrinskoy. Schmemann et Meyendorff ont tous les deux quitté Paris après la guerre pour le Saint Vladimir’s Seminary à New York, où Schmemann a passé les dernières années de sa vie comme doyen. Une de ses spécialisations et ses prédilections a été la liturgie.

Comme le p. Alexandre nous dit dans son introduction, ce livre est plutôt une série de réflexions sur l’Eucharistie écrites à différents moments, qu’il a mises ensemble dans les derniers mois de sa vie, se sachant condamné par un cancer, dont il est mort jeune à l’âge de 62 ans.

C’est un livre qui va un peu en tous les sens, et qui déborde à certains moments son sujet initial. On sent une certaine urgence – il y a des choses que Schmemann pense être importantes à dire, même si cela sort du cadre strict de l’Eucharistie.

Ce qui est important, et ce que je voudrais souligner, c’est que, à la différence du livre de Cabasilas que le père Georgios nous a présenté il y a un mois, ce livre n’est pas vraiment une catéchèse. Ce n’est pas un livre qui vous dit : voici ce que disent la doctrine et la pratique orthodoxes, ce qu’il faut savoir et accepter pour marcher vers le Christ sur la route orthodoxe.

C’est plutôt un livre pour ceux qui sont un peu plus avancés sur la voie, qui commencent, si vous me permettez l’expression, à faire leur propre théologie, c’est-à-dire à couler la théologie dans leurs propres mots et trouver une cohérence. Si vous voulez : comment est-ce que je m’explique Dieu à moi-même, et éventuellement aux autres. Pour faire cela, il est utile de temps en temps de prendre un livre ‘difficile’, d’essayer de suivre la logique de son auteur et de se demander : est-ce que je mets les mêmes accents que lui, ou les mets-je ailleurs ? Son expérience coïncide-t-elle avec la mienne ou non ?

Ne prenez pas ce livre si c’est une histoire de la liturgie que vous cherchez. Oui, il y a des informations historiques très utiles en cours de route – qui faisaient quoi, et quand – mais ce n’est pas systématique.

Le vrai but du livre est de prendre l’Eucharistie, comme présentée dans les textes des liturgies de Saint Jean Chrysostome et de Saint Basile, et demander si on la célèbre d’une manière digne d’elle, qui en fait ressortir toutes ses richesses potentielles.

Le point de départ pour le père Alexandre est la liturgie comme elle a été célébrée dans la communauté russe en exil, comme il l’a connue depuis sa plus petite enfance, d’abord à la cathédrale Alexandre Nevsky à Paris et puis aussi à l’Académie de Saint Serge jusqu’en 1951, date de son départ aux Etats-Unis, et après cela aux Etats-Unis.

Je ne sais pas qui d’entre vous ont fait l’expérience de la liturgie russe à la manière traditionnelle. On remarque :

– Une coupure physique presque totale entre prêtre et peuple, le premier se trouvant derrière une iconostase impénétrable à la vue, dont il ne sort que pour la Petite Entrée avec l’Evangile et la Grande Entrée avec les dons ; pour bénir de temps en temps, et pour donner la communion.

– Les fidèles entendent très peu du texte. Les ecténies, dites par un diacre quand il y en a, les ecphonèses, l’épître et l’évangile, et les premières paroles de l’institution ‘ceci est mon corps/mon sang’, et c’est presque tout.

– En plus le tout en slavon, une langue artificielle qui n’a jamais été parlée comme telle, et aussi loin du russe moderne que Villon ou du Bellay du français moderne.

– En compensation, des chœurs superbes.

Résultat : pour Schmemann, la liturgie avait perdu sa force comme point unifiant de la communauté chrétienne. Chacun venait et se servait de la liturgie surtout pour les propres besoins de piété individuelle, un peu selon son humeur.

Essentiellement Schmemann n’a rien fait d’autre que de prendre le texte de l’Eucharistie elle-même, et à partir de ce texte, se demander ce qu’on fait vraiment en célébrant l’Eucharistie, quel rôle joue-t-elle dans la vie chrétienne, comment par conséquence se devrait-elle célébrer.

Je mentionne, en passant, un deuxième usage des textes liturgiques : comme gardiens d’un certain équilibre théologique et de spiritualité. C’est que les anciennes liturgies, surtout de St Jean Chrysostome et de Saint Basile, contiennent des expositions brèves mais complètes et surtout très équilibrées du message chrétien. Message qu’on a trop souvent déformé, faussé, déshumanisé par la suite. Les textes liturgiques nous ramènent bien au centre.

Venons maintenant au livre lui-même et aux points essentiels que relève le père Alexandre. J’en ai extrait sept.

1) La liturgie eucharistique nous sort, pour ainsi dire, de ce monde et nous fait entrer dans le Royaume, en présence de l’amour de Dieu incarné par le Christ, de la même manière que les disciples à la Sainte Cène. Si vous voulez, dans la liturgie on rejoint le Christ et ses disciples. Pour Schmemann on « entre au ciel ». On est pris là dans les mêmes agapes que le Christ et ses disciples. Avec un accent très fort qu’on sent chez Schmemann qu’on y entre comme Eglise, en communion les uns avec les autres, et non pas comme des individus.

Derrière ceci en filigrane se trouve toute une théologie de l’Eglise, que je laisse un peu à côté ici. Cela nous entrainerait trop loin.

« Si l’assemblée en Eglise est très exactement le commencement de la liturgie eucharistique et sa condition première, sa fin et son achèvement consistent en ce que l’Eglise entre au ciel, que la Liturgie est accomplie à la table du Christ en son Royaume. » (p. 19)

« Nous nous séparons du monde pour l’apporter, pour l’introduire dans le Royaume, pour en faire de nouveau un chemin vers Dieu et une partie inaliénable du Royaume éternel. Telle est la vocation de l’Eglise, c’est pour cela qu’elle est laissée dans le monde comme symbole de son salut. Et c’est ce symbole que nous réalisons par l’Eucharistie. » (p. 49)

« A chaque Liturgie, l’Eglise rencontre le Seigneur qui vient, et elle a la plénitude du Royaume qui arrive en puissance. » (92)

« Dans la nuit du monde déchu, assujetti au péché et à la mort, la Sainte Cène avait révélé la lumière qui est hors de ce monde, divine, celle du Royaume de Dieu […] C’est justement ce sens de la Sainte Cène qui se découvre dans l’expérience eucharistique de l’Eglise. Elle y accède par sa montée même vers la réalité céleste que le Christ sur terre, une fois pour toutes, avait révélée et nous avait donnée. Et lorsqu’en nous approchant de la communion, nous prions : « A ta Cène mystique, Fils de Dieu, reçois-moi aujourd’hui », cette identification entre ce qui s’effectue aujourd’hui et ce qui avait été accompli alors est exactement réelle, car nous sommes rassemblés aujourd’hui dans le même Royaume, à la même Cène que le Christ avait alors effectuée, la nuit de la fête, avec ceux « qu’il avait aimés jusqu’à l’extrême. » (pp. 221-222) 

2) C’est en effet cette célébration commune de la liturgie eucharistique qui fond l’Eglise.

« Oui, certes, l’Eucharistie a été instituée à la Cène Mystique, mais non pas comme une « autre » institution, distincte de celle de l’Eglise. Elle a été instituée comme le sacrement de l’Eglise, son élévation au ciel, son accomplissement d’elle-même à la Cène du Christ dans son Royaume. » (p. 222)

« Non, ce n’est pas le « pouvoir » ni le « droit » de convertir le pain et le vin que le Christ a institué à la Cène Mystique : c’est l’Eglise. Il l’a instituée en léguant à ses disciples et à tous ceux qui « croient selon leur parole » son Royaume en tant que demeure dans son amour. « Je vous donne un précepte nouveau : que vous vous aimiez les uns les autres » (Jean 13 :34) Ce précepte, alliance et testament, est éternellement nouveau parce qu’il est le Christ lui-même, l’Amour même de Dieu, qui nous est donné pour que par lui nous aimions les uns les autres : « Comme moi je vous ai aimées, aimez-vous les uns les autres » (Jean 13 :34). Et ce Testament Nouveau en Christ, Amour de Dieu, est l’Eglise. (pp. 223-223)

3) Schmemann voit le déroulement de la liturgie comme une montée vers Dieu, plutôt que la descente de Dieu

« Sous l’influence de la théologie occidentale, nous en sommes arrivés à considérer la liturgie non comme une montée, mais comme une descente. Toute la mystique occidentale de l’Eucharistie est marquée par l’image du Christ qui descend sur nos autels. Or l’expérience eucharistique primordiale, attestée par le déroulement même de la liturgie, proclame que nous nous élevons là-haut où le Christ se trouve depuis son Ascension et que la célébration est de nature céleste. » (57).

4) Il insiste sur le côté expérientiel

« C’est dans l’Eucharistie elle-même que nous devons chercher la réponse organique à la question du sens du mémorial, du sens de la Liturgie en tant que sacrement du souvenir. Cela veut dire qu’il faut la chercher dans la continuité, dans l’identité de l’expérience, non pas individuelle et subjective, mais ecclésiale que la hierurgie eucharistique incarne et que chacune de ses célébrations accomplit.

« Et Dieu vit que cela était bon » (ou « bien » ou « beau »………. Alors, où chercher non pas des définitions et des explications, mais d’abord l’expérience même, la connaissance immédiate de ce « bien » originel et pur ?

Nous les trouvons en entendant et en recevant ce mot-là où il a de nouveau résonné en puissance et en plénitude, comme la réponse de l’homme au « bien » de Dieu : « Seigneur, il nous est bien d’être ici » (Mat. 17 :4). Par cette réponse donnée là-bas, sur le Mont de la Transfiguration, témoignage est à jamais rendu de ce que l’homme a reçu le « bien » de Dieu comme sa vie, comme sa vocation. …. C’est par cette vision, par cette connaissance, par cette expérience qu’en son tréfonds vit l’Eglise. C’est dans cette expérience que se trouvent son principe et son accomplissement, comme ceux de tout ce qui est dans l’Eglise… » (pp. 177-78)

« Or là sont la profondeur et la joie de la foi chrétienne et de l’expérience de l’Eglise : ce qui est limité vient du tout, s’y rapporte, en témoigne, reflète sa lumière, agit par son énergie. S’il ne nous est pas donné dans ce monde de connaître la réponse pleine et entière, la voie qui nous y mène intégralement et qui nous y fait croître nous est donné dans l’Eglise. Cette voie consiste à entrer dans l’expérience et l’Eglise et à y participer avant tout par le sacrement des sacrements. Chaque fois que l’Eglise le célèbre, la plénitude de cette expérience nous est accordée, quand même personne n’aurait pu entièrement l’acquérir. Mais c’est justement notre contact avec cette plénitude qui fait naître en nous le désir d’y parvenir et d’y communier toujours plus intensément, plus pleinement et plus parfaitement. » (pp. 219, 220)

5) Pour le père Alexandre, la participation comporte un acte de foi dans le sens qu’on ne comprendra jamais tout ce qui se passe, qu’on est dépassé.

« Cependant, et on ne saurait trop y insister, il faut bien se rendre compte de ce qu’une réponse « organique », « holique », ne signifie pas une réponse complète, une connaissance totale de ce qui est révélé. Il ne nous est pas donné d’obtenir une réponse complète à aucune vraie question. Et cela, non seulement à cause de nos limitations, mais encore parce que la profondeur du mystère de Dieu et de la providence envers l’homme et le monde est insondable et que, par conséquent, notre interrogation, notre recherche, sont infinies tant ici, sur terre, que dans l’éternité. Nous sommes dès maintenant, dès notre existence ici-bas, appelés à participer au mystère céleste, à communiquer avec le ciel. Toutefois, nous ne connaissons qu’en partie, « car limitée est notre connaissance et limitée, notre prophétie. Mais quand viendra ce qui est parfait, alors ce qui est limité cessera …. A présent, nous voyons comme à travers un verre opaque, en énigmes ; alors, ce sera face à face. A présent, je ne sais qu’en partie ; alors, je connaîtrai comme je suis connu (I Cor. 13 : 9,10,12). (pp. 219-220)

6) On sent très fort que Schmemann veut se distancer de l’approche catholique de son temps : l’eucharistie n’est pas une répétition du sacrifice du Christ. Oui, le Christ est vraiment présent, mais il ne faut pas trop se casser la tête pour savoir de manière précise comment, avec tout le danger de concentrer le regard sur côté sacrificiel, sur la crucifixion. Pour le père Alexandre, l’Eucharistie reprend la Sainte Cène comme l’expression suprême de l’amour du Christ pour ses disciples. Il cite plus d’une fois le verset qui commence le récit de la Sainte Cène dans l’Evangile de Jean : « Avant la fête de Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde au père, Jésus, qui avait aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout. » (Jean 13 : 1). Pour lui le sacrifice est dérivatif de l’amour, c’est l’amour qui prime. Il cite très à propos les paroles que dit le prêtre entre le ‘Ceci est mon corps/ceci est mon sang’ et l’épiclèse quand il demande à Dieu d’envoyer son Saint-Esprit pour sanctifier les dons : ‘Commémorant donc de commandement salutaire et tout ce qui a été fait pour nous : la Croix, le Tombeau, la Résurrection au troisième jour, l’Ascension au ciel, le Siège à la droite, le second et glorieux Avènement. On entre, on est intégré, dans un processus beaucoup plus large d’ascension vers Dieu. On regarde la croix, mais en même temps cette croix n’est qu’une étape intermédiaire, dépassée par le Christ et à être dépassée, d’une certaine façon, par nous aussi.

« Aussi la Victime immolée une fois pour toutes ne cesse-t-elle pas d’être apporté et le Seigneur d’être crucifié pour les péchés du monde. Il demeure le Prêtre et le Médiateur pour le monde devant le Père, et l’Eglise, son corps, qui communie avec sa chair et son sang, participe à son sacerdoce et intercède par sa médiation. Elle n’apporte pas de nouveaux sacrifices, car toute la plénitude du salut a été donnée au monde « par l’offrande du Corps de Jésus-Christ, faite une fois pour toutes » (Héb. X. 14). Etant son Corps, l’Eglise est elle-même sacerdoce, offrande et sacrifice. » (p. 94)

“Enfin, une dernière remarque s’impose : ces réductions ont provoqué, tant dans la théologie que dans la vie liturgique, une séparation presque complète entre la doctrine de l’Eucharistie comme sacrifice et celle de l’Eucharistie comme sacrament de communion. Notre théologie officielle semble les faire simplement coexister sans les relier intérieurement. » (p. 216)

7) La où le père Alexandre a des mots très forts, c’est en distinguant entre ‘foi’ et ‘sentiment religieux’.

« Si la méthode même de la théologie explique que celle-ci, détachée » de l’expérience vivante de l’Eglise, ait perdu de vue l’unité, une pareille disparation de celle-ci dans la piété moderne a été causée par le fait que la foi s’est graduellement dissoute dans ce qu’on peut définir d’une manière générale comment « le sentiment religieux’. Beaucoup trouveront une telle affirmation bizarre et même dénuée de sens, car de nos jours, foi et sentiment religieux sont devenus synonymes. Pour le Christianisme et dans son expérience, ce sont pourtant là deux choses fort différentes. La foi, c’est toujours et avant tout rencontrer l’Autre, se convertir à l’Autre, le recevoir en tant que « la voie, la vérité et la vie », c’est L’aimer de désirer s’unir totalement à Lui, de telle sorte que « ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi » (Gal. 2 :20) Parce que la foi vise toujours l’Autre, par elle l’homme sort des limites de son moi. Elle entraîne un changement radical de son rapport d’abord à lui-même. Le « sentiment religieux », cependant, qui prévaut aujourd’hui en matière de religion, diffère de la foi justement parce qui il se nourrit de lui-même, c’est-à-dire de la satisfaction qu’il procure et qui, en fin de compte, est fonction d’émotions et de goûts personnels, de « besoins spirituels » subjectifs et individuels.

Pour autant qu’elle est authentique, la foi ne peut manquer d’être un combat intérieur : « Je crois, Seigneur, viens au secours de mon incroyance : » (Mc. 9 : 24). Le sentiment religieux, en revanche, « contente’ précisément parce qu’il est passif ; et si tant est qu’il recherche quelque chose de concret, c’est surtout du réconfort, de la consolation dans les difficultés de l’existence. Pour sa part, encore que son sujet soit toujours une personne, la foi n’est jamais individualiste, car elle vise ce qui se découvre à elle comme la Vérité absolue. De par sa nature, celle-ci ne peut pas être individuelle. Aussi la fois exige-t-elle constamment d’être confessée, exprimée, d’attirer et de convertir à elle autrui. Le sentiment religieux, au contraire, est parfaitement singulier, on l’éprouve comme quelque chose d’inexprimable qui se replie frileusement sur lui-même dès qu’on de l’exposer, de lui donner un sens, car ce serait une « intellectualisation » inutile et nocive » qui risquerait de détruire « la foi toute simple ». La vrai foi aspire à illuminer intégralement l’ensemble humain en dominant la raison, la volonté et la vie entière. Le sentiment religieux, lui, se résigne facilement à une rupture entre la religion et la vie ; il fait bon ménage avec des conceptions, des convictions, voire des idéologies non seulement étrangères, mais souvent directement opposées au christianisme.

« Or il s’agit en réalité de la visée intérieure de la conscience ecclésiale, du trésor dont l’Evangile dit que là sera le cœur de l’homme (Matt. 6 :21) et qui constitue l’inspiration et le moteur de la vie de l’Eglise. Pour l’Eglise du Christ, ce trésor a toujours été, sera toujours et ne peut pas ne pas être le Royaume de Dieu, c’est – dire l’unité d’en haut, avec Dieu en Christ par l’Esprit Saint. L’Eglise n’a été laissée sur terre et elle ne « pérégrine » que pour le révéler dans « ce monde » et, par là, le sauver. Son témoignage et sa bonne nouvelle ne sont que du Royaume, et sa vie n’est qu’en lui, de l’unité dans le monde, l’instruction qu’il a donnée à ses apôtres et, donc, à l’Eglise, de prêcher l’Evangile à toute créature, en baptisant « au nom du Père et du Files et du Saint-Esprit », ce qui signifie faire entrer les hommes dans l’Eglise et la construire, tout cela apporte au monde une division définitive : non pas la paix mais le glaive (Matt. 10 :34).  (pp. 164-165)

Je finis avec quelques mots du père Alexandre sur l’Eglise – qui sortent un peu du cadre, mais qui valent la peine d’être médités.

“Or l’Eglise est union d’amour, ou encore, selon Khomiakov, elle est « l’amour comme organisme », non seulement en ce sens que ses membres sont unis par l’amour, mais aussi et surtout dans ce sens que par cet amour de tous les uns envers les autres, par l’amour en tant que la vie même, l’Eglise manifeste au monde le Christ et son amour, elle en témoigne ; et elle aime et sauve le monde par l’amour du christ. L’Église a pour mission dans le monde déchu de révéler le ponde régénéré par le Christ comme son salut. Le monde déchu est caractérisé par la rupture, la déchirure entre tous, que l’amour « naturel » de certains pour quelques-uns ne surmonte pas et qui triomphent dans la « séparation » ultime : la mort…. Le caractère essentiel de l’Eglise, en revanche, est de manifester et de rendre présents dans le monde l’amour comme vie et la vie comme amour. En s’accomplissant elle-même dans l’amour, l’Eglise en porte témoignage devant le monde, elle le lui communique et, par cet amour, elle « guérit la créature asservie à la loi de la division et de la mort. Chacun reçoit mystérieusement en elle la force « d’aimer de l’amour de Jésus-Christ » (Phil. 1 :8), d’en être le témoin et le porteur dans le monde. (144)

… Oublierions-nous que l’Eglise a justement pour mission de surmonter l’aliénation horrible que le diable a introduite dans le monde afin de le perdre. Et qui si nous nous rendons dans une église, c’est précisément pour y trouver cet amour-là ? Et il est toujours donné dans une assemblée de frères. (146)

…. Nous préparer, c’est nous demander si nous nous rendons à la Liturgie pour y chercher cet amour du Christ, comme des gens qui ont faim et soif non seulement de secours et de réconfort, mais encore du feu qui consume toutes nos faiblesses, nos limitations, et qui nous illumine de l’amour nouveau du Christ. (147)

Donnée par le père Michael le dimanche 25 juin 2023.